Si j’apprécie de lire des biographies, je trouve cela encore davantage intéressant si c’est le protagoniste lui-même qui l’écrit.

 

 

Dans cette autobiographie du musicien trompettiste, Miles Davis (1926 – 1991) nous livre son histoire en remontant dès son enfance dont il nous conte son addiction aux sucreries, ses visites chez ses grands-parents ou encore ses pires bêtises.

Il commence aussi par son amour pour sa famille et son admiration pour son père fervent défenseur des noirs.

Au fil des pages, on devient à notre tour admirateur de ce père aimant et énormément bienveillant, qui a toujours la phrase d’encouragement parfaite pour chaque situation.

 

On apprécie également le style de notre conteur : sa façon parfois crue de parlercomme s’il nous racontait l’histoire de vive voix -, bien que ce soit en même temps très bien écrit.

Puis il faut l’écouter raconter comment il est tombé amoureux de la musique !, cela semble magique.

« J’ai encore en tête la musique que j’entendais dans l’Arkansas, chez mon grand-père, surtout le samedi soir à l’église. Je devais avoir six ou sept ans. Nous partions le soir sur les routes de campagne sombres et, tout à coup, cette musique semblait surgir de nulle part, de ces arbres inquiétants dont tout le monde disait qu’ils étaient hantés de fantômes. Bref, nous étions au bord de la route […], quelqu’un se mettait à jouer de la guitare comme B.B. King, un homme et une femme chantaient, parlaient de déprime. Merde, c’était quelque chose, surtout la femme. […] Ce son-là, ce côté blues, église, funk de petite route, cette sonorité et ce rythme rural du sud, du Midwest. C’est à la tombée de la nuit, sur les effrayantes routes secondaires de l’Arkansas, lorsque les chouettes sortent en hululant, que ce son se mêla à mon sang. Et quand j’ai pris mes premières leçons de musique, j’avais peut-être bien, déjà, une idée de ce que je voulais que ma musique soit. « 

Il enchaîne alors avec ses débuts dans l’apprentissage musical, sa passion pour la musique et sa volonté, très jeune déjà, de devenir fermement musicien.

Vient alors son entrée professionnelle dans le milieu musical à New-York. On y suit sa vie dans la capitale où la musique y a une place évidemment prédominante entre ses cours à la Julliard et les bœufs ou concerts le soir.

 

Ce que j’aime aussi avec les (auto)biographies : bien souvent, au-delà de l’histoire d’une personne, c’est celle de toute une époque que l’on suit.

Ici, on découvre donc également l’histoire des clubs New-Yorkais en pleine période de ségrégation.

Puis c’est sans compter tous les musiciens que l’on croise, on a l’impression que l’artiste a été en contact de tous les grands jazzmen d’une époque. Tout au long du livre, Miles Davis évoque de nombreux musiciens de jazz mais aussi de rock, dont ceux auprès desquels il a énormément appris : Dizzi Gillespie, Charlie Parker, Thelonious Monk, Charles Mingus, Gil Evans, Coleman Hawkins, Art Tatum, Billie Holiday, Duke Ellington, Chet Baker, John Coltrane, Art Barkley, Sarah Vaughan, Bill Evans, Archie Stepp, Cecil Taylor, Sting, Prince, U2 et il a même fréquenté Jimi Hendrix.

 

Au bout d’un moment, on a également le sentiment que le livre ne tourne qu’autour des problèmes de drogue des musiciens. Problèmes auxquels il commencera par se « vanter » de ne pas tomber dans ces travers, puis il n’y échappera pas, n’arrivera pas à s’en défaire et ils finiront par régir un peu sa vie… .

 

Malgré tout, il a voué sa vie à la musique, dans différents groupes au départ, avant de monter son propre groupe.

« On a passé une nuit blanche à parler de musique. Quel pied ! »

Côté musique, tous les détails de la vie d’un musicien y passent : il nous raconte ses concerts et ses tournées – on apprend qu’elles sont les lieux du monde où il considère être le mieux accueillit -, les enregistrements d’albums… mais également son travail constant du son, sa volonté de sans cesse se renouveler musicalement – il va alors se mettre à s’intéresser à la musique modale orientale ou encore au rock -, son rapport au public, ses inspirations musicales ou encore le fait que seul l’approbation du public l’intéressait et certainement pas l’avis des critiques.

Au-delà de son propre rapport à la musique, on en apprend également sur comment tel ou tel musicien compose ou sur sa façon d’interpréter, il évoque également le rôle de la musique dans les mouvements noirs ainsi que dans les changements de société (notamment en ce qui concerne le mouvement hippie).

Ce que j’admire aussi chez lui, à la lecture de son autobiographie, c’est qu’il s’est toujours intéressé pleinement à la musique et à ses évolutions – il s’est notamment beaucoup intéressé au compositeur contemporain Stockaussen – pour mieux comprendre la musique et faire évoluer la sienne. Il n’a jamais souhaité s’enfermer dans un schéma qui marche.

Niveau style musical, il est question du style de jazz le be-bop puis du début du free jazz, mais aussi plus largement de l’évolution du jazz ainsi que son attrait par le public qui va peu à peu le délaisser lui préférant le rock.

 

Si la musique était au centre de sa vie, sentimentalement, il n’a jamais vraiment su se poser. On découvre ses rencontres amoureuses dont celle qui a malgré tout été son plus grand amour : « Elle m’a appris ce que c’était d’aimer quelqu’un d’autre que la musique ».

 

 

« Fallait voir la tête de tous ces blancs […] Nous avons traversé le hall jusqu’à la réception, tous les yeux rivés sur nous ! Ça dérangeait leurs putains de têtes, de voir dans le grand hall deux Nègres qui n’étais pas des employés » : décrit bien sa façon de parler crument et sa haine contre la façon dont les blancs les traitaient.

Il en a en effet beaucoup souffert. Il nous raconte comment il a eu notamment des ennuis par la police elle-même à de nombreuses reprises juste pour sa couleur de peau. C’est également l’époque de Martin Luther King et bien sur, il ne fait pas non plus l’impasse dessus.

 

 

A la fin de sa vie, si la musique était toujours présente, il a fait évoluer son amour de l’art en s’intéressant à la peinture et en se mettant à peindre lui-même.

 

Une biographie très intéressante !

 

Pour écouter Miles Davis :

Photo de Caroline

Article rédigé par Caroline Hugues

Je suis musicienne, passionnée de musique et d'écriture. Amoureuse de l'art et la culture en général mais aussi de la nature et de l'enseignement.

Je donne des cours de musique enfants en ligne - dès 4 ans - avec la formidable méthode ludique Mélopie : un apprentissage concret de la musique et du piano, à travers le jeu et la mnémotechnie grâce à des personnages attachants et un univers musical féérique.

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